C’est devant un concessionnaire automobile que le Mouvement paysan des Landes, composé des syndicats Modef et Confédération paysanne, avait donné rendez-vous à ses sympathisants. Comme l’a expliqué Mélanie Martin, présidente du Modef des Landes, il s’agissait notamment de « dénoncer le poids du lobby automobile européen qui a gagné et sacrifie l’agriculture française avec l’accord UE-Mercosur ».
À la veille de mobilisations orchestrées par la FNSEA, alors qu’elle est responsable de la crise structurelle du modèle agro-alimentaire qui vise systématiquement la libéralisation des marchés agricoles et conduit à la disparition de milliers de fermes par an ainsi qu’à la précarisation des paysans ; à la veille de mobilisations orchestrées par la Coordination rurale qui surfe sur la colère agricole pour vendre ses raisonnements tronqués, sectaires et identitaires, et qui utilise une violence démesurée et mal ciblée ; à la veille de ces manœuvres purement électoralistes, le Mouvement paysan des Landes voulait faire entendre sa voix « dans la bonne humeur tout en s’adressant à la population grâce au barrage filtrant que nous avons organisé sur la rocade et sur lequel nous avons été bien accueillis. Les gens comprennent les problématiques de l’agriculture, mais il faut tout de même leur préciser le modèle agricole de demain que nous portons : une agriculture tournée vers l’avenir avec la défense d’un modèle social et environnemental durable », souligne Mélanie Martin.
L’agriculture française ne se brade pas !
Emilie Deligny, Porte-parole de la Confédération paysanne des Landes, a rappelé que les deux syndicats étaient fermement opposés à ce traité « parce que ce sont les accords de libre-échange qui déstabilisent la production agricole française et qu’ils ne sont pas une solution pour permettre aux paysans d’avoir un meilleur revenu. Bien au contraire, ce sont toujours les industriels, les multinationales qui se gavent sur notre dos ».
Le Mouvement paysan des Landes explique que les traités de libre-échange, notamment avec le Mercosur favorisent :
• La dérégulation des marchés qui casse les protections à l’importation en termes de prix, de qualité, etc.
• Une logique néocoloniale qui préserve les intérêts des grandes multinationales au détriment des populations locales avec un accaparement des terres et des ressources.
• Un modèle agro-alimentaire qui marche sur la tête : nous surproduisons de la nourriture et pourtant des personnes souffrent encore de sous-nutrition, de malnutrition, et d’autres meurent de faim, dans nos pays développés et encore plus dans les pays du Sud.
• La concurrence déloyale entre agriculteurs, les inégalités de revenus et la précarisation des paysans d’ici et du Sud.
• La casse de l’agriculture paysanne et vivrière qui nourrit les populations plutôt que la spéculation.
• Les menaces sur l’élevage français avec près de 100 000 tonnes de viande bovine, 180 000 tonnes de viande de volaille et 25 000 tonnes de viande porcine importées sans clauses miroir qui garantissent la même qualité que la viande française.
• Les atteintes à l’environnement, la biodiversité avec des répercussions incommensurables sur le vivant et changement climatique.
Bref, ils sont une aberration économique, sociale, sanitaire et environnementale.
Des revendications claires
Le modèle agricole français et international doit changer pour garantir un revenu décent aux paysans pour leur production de qualité et les services rendus au vivant (santé humaine, animale et environnementale). Le Mouvement paysan des Landes articule ainsi sa vision internationale de l’agriculture autour de plusieurs propositions :
• Une organisation juste et équitable du commerce international, qui cesse de mettre en concurrence les paysans du monde entier, de contribuer au dérèglement climatique et de piétiner les droits humains.
• La sortie de l’agriculture de tous les traités de libre-échange et de l’OMC. Le gouvernement français ne peut plus se contenter de dire qu’il est « contre cet accord UE-Mercosur en l’état ». La France doit obtenir le retrait définitif du mandat de négociations dont la Commission européenne dispose sur l’accord UE-Mercosur.
Cet accord de libre-échange n’est pas le seul en cause, c’est bien l’ensemble des accords de libre-échange qui doit être remis en cause pour répondre aux causes de la colère agricole. Stopper l’accord UE-Mercosur devra amener à d’autres victoires rapides contre le Ceta, l’accord UE-Maroc, l’accord UE-Nouvelle-Zélande…
• La relocalisation des filières : les paysans de notre mouvement sont impliqués dans la création et le développement des filières huile avec la Coop Adour Protéoil, farine avec la Coop Haria Blanca, chanvre avec la Coop Cambadour.
La création de filières et leur déploiement relève du rôle et des missions de service public d’une Chambre d’agriculture. Or dans les Landes, la Chambre ne fait pas ce travail de développement agricole. Donc nous agissons avec nos petits moyens pour faire éclore une agriculture paysanne locale qui soit plus robuste face au système économique globalisé.
• Le développement de l’agriculture paysanne nourricière pour tendre vers la souveraineté alimentaire des territoires où que ce soit sur le globe.
Si les représentants syndicaux de la FDSEA et des JA se sentent perdus, les paysans du Modef et de la Confédération paysanne, eux, n’ont qu’une seule boussole : l’agriculture paysanne et familiale, rémunératrice, économiquement viable, socialement équitable et écologiquement responsable.