Maison Barthouil : le culte de l'exception

Guillemette et Pauline Barthouil, désormais aux commandes de l'entreprise familiale.

Maison Barthouil : le culte de l'exception

Maison Barthouil : le culte de l'exception

Avec la "Maison du Saumon", inaugurée le 1er juin 2023, la Maison Barthouil invite ses visiteurs à suivre la fascinante odyssée du Salmo salar, de la mer du Labrador aux frayères des torrents pyrénéens, en passant par Peyrehorade. Elle fait aussi la part belle au canard gras, l'autre produit phare de l'entreprise familiale qui a fait le choix sans concession de l'artisanat.

"L’histoire que l’on racontait plaisait à nos visiteurs mais il nous manquait un espace pour la mettre en valeur", raconte Pauline Barthouil. C'est désormais chose faite, avec l'ouverture ce 1er juin de la "Maison du Saumon", voisine des ateliers historiques de l'entreprise sur la rive gauche des Gaves réunis, à Peyrehorade. Le lieu se veut une vitrine des savoir-faire de la Maison Barthouil, spécialisée depuis près d'un siècle dans le canard gras et le saumon haut de gamme. On y raconte, à travers une scénographie soignée, l'un des plus grands mystères du règne animal : la migration du saumon de l’Atlantique qui, après plusieurs années à voguer dans l’Atlantique Nord, revient se reproduire dans le bras de rivière qui l’a vu naître, dont il garde en mémoire le "souvenir". Peyrehorade, point de passage obligé entre l'embouchure de l'Adour et les torrents pyrénéens, a longtemps vécu au rythme de cette migration, développant toute une culture locale de pêche et de gastronomie.

Rapport sensible aux produits

Gaston Barthouil, fondateur de la Maison familiale en 1929, fut le premier à fumer les saumons grâce à une technique acquise au Danemark par son chef d'atelier, Joseph Labarthe. C'était en 1958 et depuis, le processus de fumage n'a subi que d'infimes modifications : les fumoirs créés par le patriarche sont toujours en fonction, alimentés comme à l'origine par le bois d'aulne prélevé dans les barthes voisines, et la découpe des saumons se fait toujours à la main, selon le process mis au point par son fils Jacques Barthouil dans les années 90. A une époque où il n'est question que de production à outrance, celui-ci oriente l'entreprise familiale, alors en grande difficulté, vers un artisanat sans concession. Un choix récompensé par l’arrivée d’une nouvelle clientèle, connaisseuse et exigeante, auprès de laquelle le savoir-faire de la Maison Barthouil trouve un nouvel écho. "Le choix de l’artisanat n'est pas le choix du passé", rappelle Pauline Barthouil, aujourd'hui à la tête de l'entreprise avec sa soeur Guillemette. "C'est un rapport sensible à nos produits qui nous pousse à nous interroger chaque jour sur nos méthodes de fabrication, à innover sans cesse pour inscrire nos savoir-faire dans notre époque."

"Le choix de l'artisanat n'est pas le choix du passé" 

D’une migration à une autre, la Maison du Saumon fait aussi la part belle au canard, qui s’engraisse naturellement avant d’effectuer son long périple annuel du Nord de l’Europe au continent africain. Cette faculté étonnante, observée depuis la nuit des temps, a donné naissance dans le Sud-Ouest de la France à la tradition d’engraissement du canard au maïs, cultivé en abondance dans la région. Ainsi est né l’un des fleurons de la gastronomie française, le foie gras, mais aussi les confits, rillettes, magrets qui ont fait la renommée du Sud-Ouest. 

Elevage traditionnel

Là encore, la Maison Barthouil cultive l'art du travail bien fait et le modèle traditionnel de polyculture-élevage en quasi-autarcie : cinq éleveurs-gaveurs sous contrat, tous situés dans un rayon de 40 km, se partagent les 25 000 canards produits annuellement, à raison de 400 canards par cycle. Après 8 à 12 jours passés en poussinière (en fonction des températures), les canards ont l'opportunité de sortir des bâtiments. Mais c'est à partir de 21 jours que commence pour eux la vie au grand air, sur les parcours herbeux. Durant les 14 semaines d'élevage, les canards sont nourris pour moitié avec du blé, du soja et des oligo-éléments, et pour l'autre moitié avec du maïs en grain, le plus souvent cultivé sur l'exploitation. Enfin, pendant 12 à 13 jours, ils sont engraissés sur place par l'éleveur, de la manière la plus traditionnelle qui soit, avec du maïs grain entier pré-cuit, à raison de deux repas par jour. Ils sont ensuite abattus de nuit dans un abattoir situé à moins de 30 minutes des fermes. 

Cette exigence, à contre-courant de la standardisation et de la massification observées par ailleurs, lui permet également de préserver ses débouchés, que ce soit auprès de chefs renommés, dans des commerces de bouche spécialisés, dans ses deux boutiques de Paris ou dans celle de Peyrehorade, elle aussi rénovée il y a peu. En limitant sa production à 100 tonnes de saumon frais avant transformation, 20 tonnes de tarama et 110 tonnes de foies gras, magrets et autres conserves à base de canard, la Maison Barthouil, qui emploie 35 personnes, a réussi à préserver ses savoir-faire et sa singularité. Et cela fait bientôt un siècle que ça dure.

www.barthouil.fr
 

La Maison du Saumon

378 Route d’Hastingues à Peyrehorade

Ouverture le 1er juin 2023

Visites guidées et commentées de juin à fin septembre, du mardi au samedi matin.

Horaires des visites : 10 h 30 - 15 heures

7€/personne avec dégustation. Gratuit pour les moins de 12 ans.

Réservation conseillée. Groupes sur rendez-vous.

05 58 73 75 72

 

Publié le 26 mai 2023 dans Les Infos Agricoles par Sylvain Lapique. Tous droits réservés.